Avant-Propos A l'approche de la fin du XXème siècle il semble bienvenu de se retourner sur presque trois cents cinquante ans de présence mennonite et de se demander ce que sont devenues les assemblées françaises de cette dénomination. La dernière description de ce mouvement en France date de 1977, année de publication des Assemblées anabaptistes - mennonites de France par Jean Séguy, alors maître de recherche au CNRS (Paris). Cependant cet auteur ne concentrait pas son effort sur les assemblées individuelles mais bien plutôt sur le mouvement mennonite en France puis comme un tout, et considéré entre son origine et la fin des années cinquante. La dernière histoire des assemblées individuelles remonte à Pierre Sommer qui, entre 1929 et 1933 publia mensuellement dans Christ Seul ( périodique des Eglises mennonites de France) des monographies sur les assemblées existant à son époque, et sur les assemblées ayant disparu avant cette époque . Le présent ouvrage ne prétend pas concurrencer l’œuvre de Séguy mais se veut une suite de celle de Sommer, une actualisation de la situation et aussi une information sur le fonctionnement aujourd'hui des Eglises mennonites. Ce travail s'adresse à la fois aux mennonites qui seront intéressés par la situation actuelle de leurs coréligionnaires français et à tout lecteur curieux. Les mennonites sont, de manière générale peu connus. Si les medias s’intéressent à eux, ils choisissent des cas extrêmes comme les groupes venus de Russie, installés surtout en Amérique du Sud et que la télévision choisit de montrer dans toute leur tristesse et leur rigidité. Le mouvement français ne peut pas se reconnaître dans ces portraits mélancoliques. Le désir de procurer une information plus juste ainsi que celui de fixer une situation à un tournant de siècle ont motivé les auteurs de cet ouvrage. Une enquête organisée en 1994 par l'AEEMF permet de documenter statistiquement certains aspects de cet état des lieux et indique que la communauté mennonite française comprend 2011 membres baptisés. Après avoir, dans une première partie générale, décrit l'organisation et les particularités de ce mouvement en France aujourd'hui, les auteurs décriront chacune des 30 assemblées françaises citées dans l'annuaire de l’AEEMF 1999 par ordre alphabétique. Les points généraux décrits dans la première partie seront repris pour chaque assemblée dans la mesure où ils sont enrichissants pour la description. Pour ce faire les auteurs se sont appuyés sur des documents - Christ Seul, Annuaires de l’AEEMF, Enquête sur les Assemblées Evangéliques Mennonites de France (1994), Souvenance, livres de Sommer, Séguy, Mathiot Boigeol, témoignages etc. - dans le but d’offrir aux lecteurs ou éventuellement au futur chercheur une banque de données exploitable. Préface Comme celle de tous les groupes, religieux ou non-religieux, l’histoire des mennonites peut s’écrire de multiples façons. Pour s’en rendre compte, il suffit de consulter une Bibliographie de travaux historiques. La seule lecture des titres des ouvrages rassemblés dans ces listings savants montre vite la vérité de notre assertion de départ: telle <> est locale, telle autre régionale, telle autre encore nationale ou internationale; elles peuvent concerner des périodes diverses d’une <>, ou l’aborder de manière globale, ou thématique au contraire, sous des aspects on ne peut plus variés ou sous certains aspects seulement. Des points de vue que nous venons d’évoquer, qu’en est-il du travail que André Nussbaumer et Michèle Wolff livrent à notre lecture? Leur ouvrage, Assemblées mennonites françaises à la veille de l’an 2000 ne se présente pas - le titre le dit clairement - comme une <> visant le mouvement mennonite en tant que totalité, fut-ce de manière nationale ou régionale. Le regards des deux historiens se porte en l’occurrence sur les Assemblées - ou Eglises - locales, sur ce que, en d’autres contextes confessionnels, on appellerait - non sans quelques approximations, et donc un minimum d’erreur - des paroisses. Pour les mennonites, l’Assemblée est l’Eglise locale dans son autonomie. Elle est formée d’adultes baptisés sur confession de leur foi en Jésus-Christ: en vue d’une vie quotidienne conforme à l’Evangile. Selon la lecture qu’en fait la tradition mennonite, reçue et exprimée dans ces groupes locaux. L’existence - dès les débuts de ce mouvement, au XVIème siècle - d’instance de communion entre ces Assemblées locales n’infirme pas ce que nous venons d’affirmer: les mennonites sont - quant à leur <> - des congrégationalistes conséquents; rien ne vaut pour aucun d’entre eux qu’approuvé par leur propre Assemblée locale - se prononçant à la majorité, et si possible à l’unanimité de ses membres. Les perspectives que nous venons de décrire favorisent l’unité, mais aussi et non moins, les conflits en matière de croyances, de pratiques, de voir, de concevoir, de faire entre individus et tendances collectives. Il fut un temps (jusqu’à la fin du XIXè siècle en gros) où les moindres désaccords en tout domaine - y compris vestimentaire - étaient sanctionnés par des schismes - locaux la plupart du temps - ou par l’excommunication, jusqu’à résipiscence, des <>, individuels ou collectifs. Il y a aujourd’hui, dans les Assemblées comme ailleurs, plus de tolérance et moins de certitudes dogmatiques autour de bien des choses, et la contrainte n’aboutit plus toujours aux fins qu’elle s’assigne, là comme ailleurs encore. Cette situation ne rend pas toujours plus facile la tâche des ministres (les <>) dans les Assemblées actuelles. Celles-ci se veulent autonomes en effet - par rapport aux Etats en particulier -, mais ne s’acceptent pas sans <>. Ces ministres - autrefois anciens, ou <>, serviteurs de la Parole (prédicateurs), serviteurs des pauvres (diacres); à ceux-ci s’ajoutent en certains lieux des <> salariés et formés dans des écoles bibliques ou des facultés de théologie - surent, dans le passé des Assemblées, s’imposer à leurs corréligionnaires parfois de façon assez rude. On savait alors - on le sait moins aujourd’hui - que repérer et réprimer les déviances faisait partie de leurs devoirs. Ceux des lecteurs qui aborderont les pages du livre de Nussbaumer et Wolff à partir d’une certaine connaissance -extérieure ou intérieure - de la population mennonite ne manqueront probablement pas de s’interroger sur le peu de place faite - en apparence seulement, on va le voir - au réseau des familles mennonites d’ancienne origine, à l’<> mennonite en somme, issue de l’anabaptisme suisse et qui forme encore aujourd’hui le fondement biologique des réseaux mennonites français. A un premier regard, le lecteur les voit apparaître cependant au niveau des noms de famille formant une assemblée; ou sur les pierres tombales des cimetières, bien exploités ici, et il faut s’en louer car c’est là un travail qui avait été négligé jusqu’ici. Mais on ne saurait en rester à ce premier coup d’œil. Il faut noter, vers la fin de l’ouvrage (et hors des fiches présentant les Assemblées individuelles l’une après l’autre) sept pages du plus grand intérêt. Elles contiennent en effet une série de courtes et denses <>. En parcourant ces pages, on s’aperçoit que parmi les personnalités en question, certaines impriment leur marque sur cinquante années successives de l’histoire du XXè siècle, et qu’il s’agit - dans tous les cas - de descendants de familles suisses (bernoises) et d’ancienne implantation dans la France de l’Est. Tel est le cas, en tout particulier, de Pierre Sommer l’Ancien (1874-1952), réorganisateur au début du XXè siècle, des Assemblées - alors fort mal en point - et <> de la plupart des institutions qui font encore vivre les Eglises Mennonites de France en communication entre elles: les Conférences annuelles, le mensuel Christ Seul, les études bibliques, annuelles elles aussi, dans les groupes locaux, la formation générale et permanente des Serviteurs etc., etc. Au nom de cet Ancien prestigieux, il y a lieu d’ajouter ceux de tous les autres <> de même origine qui formèrent la cohorte des animateurs du premier Réveil des Assemblées entre 1901 et la Deuxième Guerre mondiale. L’ouvrage de Nussbaumer et Wolff se présente sous l’aspect de fiches à entrées descriptives multiples. Lorsqu’on a visité toutes ces entrées - ornées à leur fronton du nom d’une Assemblée - on sait à peu près tout de ce qu’on peut actuellement savoir - par les archives revisitées et les travaux précédents, par les enquêtes récentes dues à nos deux auteurs ou à d’autres - sur l’ensemble des points qui contribuent à <> la dynamique sociale et religieuse d’une Eglise locale donnée. Les deux auteurs déjà nommés renvoient souvent à l’Historique des Assemblées que Pierre Sommer l’Ancien (1874-1952) publia, dans Christ Seul, le mensuel des Assemblées françaises, entre 1929 et 1933. Je sais, pour avoir souvent exploité les données du travail en question de P. Sommer que ce genre de littérature se montre souvent précieux - l’adjectif n’a rien d’exagéré - lorsqu’on cherche des renseignements précis de nature locale. On concède qu’il présente moins d’agréments à qui en prend une connaissance plus générale, et qui se heurte à la répétitivité des items d’une fiche à láutre, ou au manque de sens immédiat des chiffres, pourtant pleins d’intérêt eux aussi parfois. Jean Séguy Directeur de Recherches Honoraire, CNRS